Le Plan d’action en sécurité routière dévoilé à la veille de la rentrée scolaire par la ministre des Transports et de la Mobilité durable envoie un signal clair sur la nécessité d'agir collectivement pour sécuriser les milieux de vie. Parmi les mesures, le plan met l’accent sur la sécurisation des zones scolaires et des trajets des élèves utilisant le transport actif, entre autres par la bonification d’outils existants tels que la présence de radars photos. Ce sont de bonnes nouvelles pour la sécurité de nos enfants. Au-delà de ces mesures, il est aussi possible d’élargir le coffre à outils et de déployer à plus grande échelle des gestes d’aménagement de l’environnement urbain qui ont un impact positif sur nos milieux de vie, comme la rue-école.
Depuis quelques années, des projets de rues-écoles ont émergé sur l’île de Montréal et un peu partout dans la province, le plus récent en date devant 3 écoles primaires à Québec. Ces interventions consistent à fermer une rue située aux abords immédiats d'une école à la circulation automobile aux horaires d'arrivée et de départ des enfants, qui sont des lieux et des moments particulièrement éprouvants pour les jeunes piétons. Outre l’impact immédiat et positif sur l’apaisement de la circulation, les rues-écoles permettent aussi l’adoption de saines habitudes de vie et l’appropriation de l’espace public par les enfants et leur famille. Ce sont des parents bénévoles mobilisés et appuyés d’organisations locales ou de municipalités innovantes qui ont porté ces initiatives à bout de bras.
À cet effet, les données relevées lors des projets-pilotes réalisés à Montréal par la chercheuse Prof. Katherine Frohlich et son équipe à l’École de santé publique de l’Université de Montréal sont révélatrices : moins d’élèves ont été conduits en voiture les journées de rues-écoles, et plus d’élèves se sont rendus à l’école de façon active (environ 14%). Également, moins de déplacements automobiles ont été effectués (près de 32%) et moins de comportements dangereux de la part des automobilistes ont été observés lors des journées de rues-écoles. Les enfants ont pris l'habitude de venir quelques minutes plus tôt à l'école pour s'approprier l'espace, ce qui a eu pour conséquence une diminution du nombre de retards les matins de rue-école. La majorité des enfants consultés a d'ailleurs exprimé vouloir plus de journées de rue-école par semaine, puisqu'il s'agit d'un endroit où ils se sentent libres, le tout dans un milieu sécurisé.
Les résultats de recherche issus des démarches québécoises, les expériences internationales (à Paris, entre autres), la mobilisation de nombreuses communautés et municipalités, et maintenant, le Plan d'action en sécurité routière, offrent les conditions favorables pour déployer et financer davantage ces initiatives. Plus encore, la multiplication d’expériences de rues-écoles dans les communautés scolaires peut devenir une source d’innovation, notamment en concevant des aménagements permanents pour faciliter la tenue de rues-écoles tout au long de l'année scolaire ou en influençant les normes favorables aux déplacements sécuritaires des piétons.
La rue-école véhicule un message clair aux automobilistes de ralentir et d'être vigilant aux abords d’une zone scolaire. C’est essentiel. Elle a aussi l’aspiration de créer une nouvelle norme pour des rues apaisées bénéficiant à toute la collectivité en créant des milieux de vie à échelle humaine et, surtout, à échelle d’enfant.
Pour en savoir plus : rue-ecole.ca
Signataires
Véronique Fournier, directrice générale, Centre d’écologie urbaine de Montréal (CEUM)
Katherine Frohlich, professeure, École de santé publique et CReSP, Université de Montréal
Stephanie Watt, co-directrice et co-fondatrice, Métalude
Denis Boivin, directeur, École Saint-Benoît (CSSDM)
Juan Torres, professeur titulaire, Faculté de l'aménagement, Université de Montréal